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Chopin, Sand et la Valse du chat...

30/10/2014
Chopin, Sand et la Valse du chat...

Un chat qui aurait inspiré Chopin et Sand ? Attention c’est du lourd ! Parce que Chopin est un des très grands compositeurs de toute l’histoire de la musique, comme il était aussi un prodige au piano, il a écrit des trucs que seuls quelques très rares interprètes ont su sublimer, au hasard, Samson François et Arthur Rubinstein.
Les Préludes, les Polonaises, les Sonates, les Nocturnes, les Etudes sont des morceaux de bravoure et il est probable qu’en tête de classement, les Valses de Chopin soient ses œuvres les plus célèbres.
Elles sont rares, il y en a dix sept.
La plus courte, « Grande Valse brillante en fa majeur, op. 34 no 3 », de 1838,  a été inspirée par un chat, et là encore on est dans du lourd, pas n’importe quel chat. Un magnifique Persan nommé Valdeck, celui de George Sand !
Le maître habitait avec la fougueuse écrivaine (c’est nase comme mot mais déjà qu’elle a un prénom peu féminin, si en plus je dis qu’il s’agit d’un écrivain, il y aura matière à confusion...) dans la propriété d’Amantine Aurore Lucile Dupin, baronne Dudevant, le vrai nom de George Sand (pas de « s » à George), dans le Berry, à Nohant.
Ils habitaient aussi à Paris, square d’Orléans, mais l’histoire du chat se passe à la campagne.
Et bien entendu le fameux Valdeck, qui se foutait comme de sa première vibrisse perdue de cohabiter avec deux gloires de son temps, n’avait aucun respect des objets cultes de ces deux immenses artistes, et quand Frédéric jouait, le chat se marrait carrément à faire joujou sur les touches avec ses papattes...
Ce qui a inspiré Chopin, il y a dans cette valse quelques accords qui reproduisent le bruit fait par le chat en train de jouer au clavier...
Je ne suis pas un malade des cimetières mais comme tout parisien qui se respecte, j’ai évidemment fait plusieurs fois le tour de cet endroit incroyable qu’est le Père Lachaise, avec des guides qui connaissent, ou parfois hélas pour accompagner un pote dont le destin a décidé qu’il était l’heure de quitter ce monde cruel.
Et si côté romantique l’endroit est carrément phénoménal, la tombe de Chopin m’émeut toujours, d’abord elle est toujours fleurie et ornée de drapeaux polonais, c’est une tombe vivante. Mais surtout, les habitants vraiment vivants du lieu sont les chats, dont Micetto a déjà parlé... Je me dis qu’un jour un de ces chats pioncera sous un rayon de soleil allongé sur cette tombe, pas fastoche parce qu’elle est célèbre et fréquentée, pas autant que celle de Morrison mais il ya quand même toujours du monde devant, et là il y aura photo !
Mais j’ai trop d’imagination, si un chat vient ici ce sera parce que les drapeaux qui flottent au vent ça le fait marrer, parce que les fleurs sont jolies, ou parce que les dames qui nourrissent ces chats à l’année auront laissé de la bouffe dans le coin. Aucun respect ces greffiers et c’est pour ça qu’on les aime mais quand même, Chopin !     

 

Vidéo de la Grande Valse brillante en fa majeur, op.34 no3

La même partition interprétée par trois des plus grands pianistes du 20ème siècle ! Il s’agit évidemment de la valse du chat de Chopin, alias Op 34 no 3... 

Micetto vous gâte comme pas possible, et au passage cela vous permettra, si cela vous intéresse, de faire jouer votre culture musicale, ou votre instinct... On n’est pas forcé d’être un mélomane absolu pour aimer la musique ! 

Bref... Samson François est un pianiste français, né en Allemagne à Francfort et mort à Paris en 1970, j’ai eu le privilège d’assister à son dernier concert, il est revenu jouer jusqu’à épuisement total. Lui c’est simple, il n’est pas pianiste, il est le piano, et personne ne peut mieux s’exprimer au piano que le piano lui-même. 

Il est l’un des champions du piano interprété, à l’image de ses immenses professeurs qu’ont été Alfred Cortot et Marguerite Long. Autrement dit il ne joue pas Chopin, il le parle. Il est Chopin, il est Schumann, il est Debussy, il aimait la nuit, le jazz, la fête, une sorte de Modigliani du piano. En concert, c’était émotion du début,  à la fin, on ressortait groggy... 

Arthur Rubinstein est polonais, de Lodz. Il est mort en 1982 à Genève. Un Polonais qui joue Chopin, c’est un peu comme un Lyonnais qui goûte un Beaujolais ou un Marseillais qui fait une bouillabaisse, il est chez lui. Il a perdu plusieurs membres de sa famille durant l’holocauste et a toujours refusé de jouer en Allemagne. Artistiquement, il est le maître du toucher, de la délicatesse. Il est Chopin dans ce qu’il a de plus romantique. Humainement, il pratiquait un humour à froid considérable, quand on lui demandait s’il croyait à l’au-delà, il répondait « Non, mais ce serait quand même une sacrée bonne surprise ! »... 

Geörgy Cziffra, mort en France en 1994,  est encore d’une d’autre école, celle du virtuose. Ce qui est logique quand on a du talent, que l’on est Hongrois et que l’on se  forme sur les partitions de Lizt, dont certaines, aujourd’hui encore, ne peuvent être jouées que par quelques très rares maestri au monde. Surnommé « le pianiste aux cinquante doigts », Cziffra, en concert, affronte Chopin, le compositeur était lui-même virtuose. Juste pour le fun, sachez que c’est Cziffra qui a transcrit pour le piano « le vol du Bourdon » de Rimsky Korsakov, qui a pu donner aux jazzmen les plus créatifs l’occasion de proposer à leurs publics ce fameux « Flight of the bumble bee » qui aura donc eu une triple vie. 

Voilà, rééecoutez les trois versions de la valse du chat, quand on vous dit que c’est du lourd, Chopin et ces trois géants de la musique s’y sont mis avec talent, tout ça parce que le chat de George Sand a eu envie de jouer avec les touches du piano en même temps que  Frédéric. D’ailleurs, vers le début de la valse, on a l’impression d’entendre le chat passer sur les touches, un petit côté musique de dessin animé qui est assez étonnant. Sacré destin ce chat !


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